Les minima salariaux, problème prioritaire?

03/02/2022 Réglementation
Réglementation  Les minima salariaux, problème prioritaire?

La grille des salaires est LE problème de la coiffure? A lire la presse grand public et les communiqués vengeurs de FO (mise à jour: FO est revenue depuis à la table des négociations) depuis des semaines on pourrait le croire mais avant d’exposer la polémique et ses (réels!) problèmes allons tout de suite à la conclusion : non les minima en coiffure n’ont pas grand-chose à voir avec la crise des vocations actuelle, c’est plus le chiffre d’affaires des salons le problème, lequel nous entraine dans un cercle vicieux de la précarisation de tous les acteurs de la profession! Sans oublier les contraintes inhérentes à un métier de service, moins acceptées après la crise du Covid19.

Salaires bas mais pression forte
Les négociations sur les minima patinent depuis quelques années entre des syndicats patronaux ayant un peu lâché l’affaire face à d’autres priorités et des syndicats de salariés peu représentatifs mais présents par obligation légale dans le système paritaire. Ces négociations sont presque hors sol face à la réalité du terrain. Le marché de l’emploi actuel rend les minima presque accessoires à l’heure où ce sont les salariés qui ont l’initiative et qui mènent les négociations, en direct et en force, du fait de la pénurie de main d’œuvre. Nombre de coiffeurs bougent pour demander des salaires qui sont bien supérieurs au minimum légal qui est, rappelons-le à certains patrons, le Smic (1600 euros brut soit 1270 euros net environ pour 35 heures) et pas le minimum de la grille ! Au cœur des demandes et des offres d’emplois, L’Eclaireur le voit depuis des années -et plus encore depuis le Covid19-, nombre d’employés, même avec peu d’expérience, ont des demandes sans rapport avec la grille (autour de 1400 euros net) tout en exigeant des horaires moins contraignants.

Mieux valoriser l'expérience et la performance
Et l’expérience aidant, les demandes à 1600 euros net et plus ne sont plus rares. Mais attention c’est un quitte ou double, certains salons à la rentabilité déjà écornée préfèrent parfois ne plus recruter que de le faire à ces tarifs car, pour être rentable un salarié doit générer autour de 2.5 fois son salaire, idéalement plus de 3 fois (tous les calculs sont à réaliser en brut). La part variable des salaires introduite par l’article 13 et destinée à motiver les coiffeurs a de son côté loupé ses objectifs. Ce vieux débat ouvert par notre journal en… 2011 (!) obtient un certain consensus, les niveaux de déclenchement de cet intéressement sont souvent inappropriés, les coiffeurs préférant un fixe plus élevé ! D’ailleurs beaucoup de salons haut de gamme dont des salaires sont plus proches de 2000 euros ont aussi des problèmes de recrutement.

Rémunérer l'effort
Le vrai souci avec la grille des salaires actuelle et qu’elle est malgré tout un peu décourageante. Quand cinq indices sont en dessous du Smic cela donne l’impression que quels que soient les efforts et l’expérience, on va toucher le même salaire pendant 10 ans. Certains patrons sont même tentés de suivre strictement des règles minimales, n’encourageant pas pécuniairement l’engagement, le travail et les heures supplémentaires. Un phénomène accentué par le fait que nombre de patrons ont parfois aussi du mal à dégager plus d’un Smic en revenu disponible après charges. Alors le blocage des négociations la faute à qui ? C’est collectif. Les syndicats? Oui ! Mais des deux côtés. Et surtout pas seulement : si le chiffre d’affaires de la profession stagne autour de 6 milliards d’euros, l’augmentation anarchique du nombre d’entreprises de coiffure depuis 10 ans et la stagnation des prix impliquent un revenu disponible par entreprise de coiffure en baisse.

Augmenter les prix
La solution ? Diablement simple mais stressante, surtout avec le redémarrage de l’inflation : augmenter les prix régulièrement et surtout dès maintenant ! Le vrai débat est là même si personne ne prétend qu’il est facile…

Photo: adobestock

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