Une loi sur la discrimination capillaire… pour quoi faire ?

01/04/2024 Réglementation
Réglementation  Une loi sur la discrimination capillaire… pour quoi faire ?

Le cheveu a inspiré les éditorialistes de tous bords depuis l’adoption en première lecture à l’Assemblée nationale du texte du député Liot de Guadeloupe Oliver Serva le 28 mars 2024. Si la loi est définitivement adoptée elle sanctionnera pénalement les distinctions fondées sur « la texture, la couleur, la longueur ou le style capillaire d’un individu ». Bien. Dont acte, vu comme ça on ne peut être contre. Sauf que… la loi prévoit déjà vingt-cinq motifs dont « Appartenance/non appartenance à une ethnie ou une nation » « les caractéristiques génétiques » et surtout « L’apparence physique » dont la coiffure fait partie jusqu’à nouvel ordre…

Perception ou discrimination?
Plus gênant, la discussion autour de cette loi a beaucoup tournée autour d’études…. anglo-saxonnes et de témoignages français éparts mais surmédiatisés repris partout ce qui masque leur faible nombre. Mais bon, admettons, pourquoi ne pas ajouter les cheveux, on aime tellement légiférer sur tout avant de se plaindre de l’inflation de textes de loi ! Pourtant, plus que la loi ce sont les perceptions qu’il faut changer. Ainsi nombre de personnes considèrent, évidemment à tort, que les dreadlocks sont associées à une hygiène approximative. Même de bonne fois, des études ont montré que des recruteurs pourtant volontaires, donc ouverts au test, se laissaient influencer, inconsciemment, par les photos de personnes chauves considérées comme moins dynamiques alors qu’il s’agissait des mêmes personnes non-chauves retouchées par Photoshop dont ils avaient approuvé le CV ! Évidemment que le style capillaire influe, les cheveux blancs renvoient à un statut de senior pas toujours bien vu sauf -grâce aux coiffeurs !-, avec une bonne coupe, un bon entretien et un style vestimentaire…. Un autre facteur de jugement plus ou moins conscient. Et les tatoués ? Et les piercés ? Il faudra aussi le préciser dans la loi comme caractéristique physique ?

Une loi déjà opérationnelle
Les auteurs de science-fiction ont déjà résolu ces problèmes dans certaines dystopies : tous en blouse, style capillaire nord-coréen et visage sans émotion. Car on n’en parle pas ou peu de la discrimination de fait des timides, des moins volubiles ou des moches… pardon, des « gens aux traits moins réguliers », etc. La commission s’est paradoxalement tiré une balle dans le pied en choisissant un exemple avéré : un steward auquel on avait reproché ses tresses, pas en tant que tresses d’ailleurs, mais parce que cela faisait « féminin ». Mais c’est justement grâce au texte déjà existant qu’Air France a été condamné ! Le sujet ayant été jusqu’en Cour de cassation, devenant une jurisprudence… Elle a ainsi retenu, en opposition avec la cour d’appel, que « la manière de se coiffer n’est ni une partie de l’uniforme ni son prolongement » et que les « codes sociaux » invoqués par la cour d’appel « ne sont pas des critères objectifs qui justifient une différence de traitement entre les hommes et les femmes ». Un cas très particulier qui retenait deux des critères de discrimination existant : le sexe, ou le genre supposé, et l’apparence physique, tout cela autour des cheveux. On attend, sans grande impatience, la suite de ces passionnants débats sur les crêtes punk en agence bancaire, les obligations de s’attacher les cheveux ou de les passer dans une charlotte pour des raisons pratiques ou professionnelles. Non en réalité normalement c’est déjà tranché là aussi, cela peut être imposé (enfin pas la crête punk !).

Photo: Adobe Stock

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