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La Rédaction de L'Eclaireur www.leclaireur-coiffeurs.com

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L' équipe de la rédaction de L' ECLAIREUR composée de  Brice Thiron, Florence Baumann assisté de l' éditeur Christian GUY ainsi que d' autres contributeurs occasionnels ont  réuni les archives de L'ECLAIREUR,  Vous bénéficiez ainsi de plus de 75 ans d' expérience de la coiffure cumulées par nos équipes,  lesquelles ont interviewé  les plus grands professionnels,  dans tous les métiers.

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06 mars 2011

Comment réaliser un bon diagnostique couleur sur sa cliente ?

Les psychologues sont formels : les premières secondes d’un contact s’avèrent capitales pour l’image que l’on donne de soi.  Selon ce principe, le coiffeur doit avant tout observer la cliente qui entre dans le salon, car le diagnostic commence à ce moment-là, dès les premiers mots et formules de politesse. Classique, introvertie, extravertie, volontaire, stricte, etc. : les premiers indices parlent d’eux-mêmes... mais sont insuffisants. « Le dialogue et le diagnostic sont les éléments qui auront le plus d’impact sur le travail à venir, explique Jean-Louis Bieckens, directeur technique France chez L’Oréal Produits Professionnels. Trop de coiffeurs -de façon paradoxale, encore plus après un stage de perfectionnement- reçoivent les clientes en ayant en tête leur propre idée ou les dernières tendances. C’est bien, cela sert de guide, mais l’essentiel reste la phase de découverte de la cliente. » Inutile d’aller trop loin, cependant, en élaborant une analyse « de bazar » concernant la personnalité de la cliente ! Non, il s’agit juste de déterminer les types de propositions que l’on va pouvoir faire.

S’ENTENDRE SUR LES OBJECTIFS DE LA COLORATION
« Après, renchérit Jean-Louis Bieckens, il faut vite revenir à des considérations plus concrètes ! Combien de shampooings la cliente effectue-t-elle par semaine ? De quels types ? Quelles couleurs ont déjà été appliquées ? Il y a combien de temps ? Décèle-t-on la présence de coiffants dans ses cheveux ? Et ainsi de suite… Puis il faut observer la façon dont la cliente ”vit sa couleur” (tout comme sa coupe, d’ailleurs). J’ai pris l’habitude de montrer rapidement des images, pour jouer à ”J’aime, j’aime pas”, afin de compléter cette phase. » Cela permet aussi de s’accorder sur la vision de chacun. Si personne ne comprend « coupe courte » de la même façon, que dire, alors, de la perception d’un « blond » ou d’un « éclaircissement » ! Marie-Hélène Real, directrice technique chez Sublimo, aime aussi cet échange autour des goûts de la cliente : « Nous n’avons pas à imposer les nôtres, c’est pour cela que l’écoute s’avère importante. Le dialogue ne doit pas être mené uniquement au feeling, mais avec méthode, dans un coin tranquille et en prenant son temps, sans le peignoir, pour voir la cliente dans son ensemble. On glane des informations, on se renseigne sur ses envies, ses peurs, ses habitudes. » Michel Guillerme, responsable technique chez Framesi, insiste sur cette phase de dialogue : « La vue d’ensemble est capitale, tout comme le fait de questionner la cliente, notamment sur ses couleurs préférées. Est-elle une femme active ou casanière ? De même, la carnation de la peau, les couleurs de sourcils et les yeux doivent retenir toute notre attention. La cliente a-t-elle un teint rosé, mat ou de porcelaine ? Dans le cas d’une peau ayant tendance à rosir, on pourra apporter des tons plus froids en coloration. Il faut déjà imaginer les teintes et les reflets qui iront avec le reste. » Et Marie-Hélène Real de préciser : « Avec des yeux marron, on peut quasiment tout faire ; lorsqu’ils sont bleus, les blonds, les cendrés s’imposent ; avec des yeux verts, j’imagine plus facilement des cuivrés ou des dorés. Mais, là encore, d’autres facteurs interviennent, dont la carnation. » La plupart des coloristes préfèrent commencer par la coupe, c’est une question de logique : comment mettre en valeur telle ou telle forme si les volumes ne sont pas déjà affirmés ? « Pour finaliser sa coiffure, nous avons appliqué une très belle couleur sur les cheveux d’un mannequin en présentation cette semaine, avec un cuivré plus sombre d’un quart de ton en racine pour donner du relief à un cheveu fin et plat », explique Jean-Louis Bieckens.

UN RÉSULTAT PROFESSIONNEL
Si la mode n’impose plus ses diktats, la domination des marrons fournit cependant une bonne base de travail « Ils sont très variés, remarque Michel Guillerme. En prime, ils sont assez neutres et plus faciles à travailler, car proches de la base naturelle de la majorité des femmes ! Il faut viser un effet de brillant, de naturel, et qui tient. » Et c’est là qu’intervient la partie la plus technique du diagnostic. Le professionnel doit déterminer avant tout le degré de porosité du cheveu, le pourcentage de cheveux blancs, la couleur de base ou le fond d’éclaircissement d’un cheveu déjà travaillé ; tout en évaluant la nature du cheveu et son niveau de sensibilisation pour savoir comment la couleur prendra, et surtout quel type d’oxydant utiliser. Le tout avant un éventuel gommage. « Avant, rares étaient les coiffeurs qui ne savaient pas repérer un cheveu coloré. Aujourd’hui, il nous faut être plus attentifs, prévient Jean-Louis Bieckens. Les couleurs plus ”cosmétiques” précédemment appliquées peuvent tromper sur l’état réel de la fibre. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à réaliser une mèche test. Au bout de 20 minutes, on regarde, et l’on s’en sert pour expliquer ce qui est possible ou non à la cliente. On s’oriente alors vers la couleur adaptée, ou vers un programme de soin simple sur deux mois, avec une coloration progressive et en douceur. L’essentiel est de montrer le vrai geste de pro, et de l’expliquer. » Se montrer professionnel, c’est aussi comprendre, lors d’une application de couleur, que si parfois le résultat ne correspond pas au nuancier, c’est que… le diagnostic a été mal fait ! « Tout dépend d’où l’on part, d’une base naturelle ou d’un fond d’éclaircissement, et avec quel pourcentage de cheveux blancs, insiste Michel Guillerme. Certains oublient de recréer le bon équilibre de bleu/rouge/jaune, ou utilisent de l’oxydant 20 volumes à toutes les sauces. C’est une erreur classique, qui provoque des reflets trop chauds en vieillissant. Or il faut s’adapter en fonction de nos constats. Du ”10 volumes” permettra à une couleur appliquée sur un cheveu déjà sensible de mieux vieillir, ou de ne pas trop éclaircir le fond en dégradant les bleus. D’autres fois, le ”30 volumes” sera nécessaire. Sur un cheveu déjà coloré, on cherchera des solutions qui font le moins possible appel à la chimie. En clair, le diagnostic conditionne tout ; après, il est trop tard. Si l’on veut être vraiment pro, on ne peut faire des erreurs de colorimétrie de base, et l’on doit anticiper sur l’évolution de l’éclaircissement. » Car le diagnostic sert aussi à estimer le travail, sa durée… et son prix. « On détermine les zones d’application, notamment en fonction de la répartition des cheveux blancs. Il ne faut pas hésiter à réaliser plusieurs mélanges de couleurs. Le cheveu blanc, surtout avec un oxydant trop fort, risque d’accentuer les pertes de pigments, ce qui renforce les reflets chauds. D’où l’ajout de reflets froids, cendrés, voire d’un titrage d’oxydant moins fort », ajoute Michel Guillerme. Ainsi, tout ce travail en amont est loin d’être perdu. « Il permet, avant même de commencer, d’être en accord avec la cliente, de lui faire au moins deux propositions, et de l’informer des écueils de certains de ses choix. Celles qui choisiront d’adopter les blonds, et même les platines de cet hiver façon Agyness Deyn, le feront en connaissance de cause, ou s’orienteront vers un choix moins radical grâce à nos conseils. On peut rassurer la cliente, en lui expliquant comment on va opérer par étapes lors de changements importants. Enfin, on l’informe sur l’entretien de la coloration et sur son coût. C’est transparent ; ensuite, la cliente choisira ou non de suivre les conseils, mais tout aura été dit dès l’entrée en salon. »

MISE EN AVANT DU FOND D’ÉCLAIRCISSEMENT ET DE LA TEXTURE
Tous nos interlocuteurs s’accordent sur les risques engendrés par trop de précipitation dans ces étapes de diagnostic, mais aussi sur le fait que l’on néglige les techniques de « précoloration ». « Un démaquillage peut s’avérer nécessaire si le cheveu a été trop ”chargé” à la maison, souligne Michel Guillerme. C’est facile, mais souvent oublié. En revanche, il faut éviter d’utiliser le terme de ”décapage”, à connotation négative. Il s’agit d’une opération que je préconise pour tous les cheveux colorés, tous les ans, afin de redonner de la brillance et d’éviter les superpositions. L’obtention d’une belle couleur implique forcément un seul passage sur le cheveu, il faut donc supprimer ce qui en parasite les effets. Dans la même logique, je réalise mes longueurs et pointes avec un autre mélange que celui appliqué en racine, avec un soin reflets ou un soin pigmentant, et non en recourant au contenu du même bol coupé d’eau ; pour certaines marques, on pourra utiliser un ton sur ton. Car, si la dilution change bien le titrage de l’oxydant, cela n’empêche pas le mélange d’être déséquilibré en termes de colorimétrie : on rajoute trop de base. » Et Marie-Hélène Real de renchérir : « Il ne faut pas hésiter à commencer par ”remonter” la couleur, à retravailler le fond. Là encore, le diagnostic systématique, même chez les habitués, est indispensable. Une cliente à laquelle on applique toujours le même mélange peut, après un retour de vacances par exemple, voir son cheveu évoluer et sa couleur se fixer différemment. Dans ce cas, il faudra en tenir compte dans le choix des teintes à appliquer. On doit estimer comment le cheveu va absorber -et retenir- les pigments. La texture est autant à prendre en compte que le cercle chromatique. » Le non-respect de ce dernier reste cependant la source majeure de ratés, à égalité avec la mauvaise interprétation et le manque d’explications, d’après Jean-Louis Bieckens. Il rappelle un autre point important : « La touche d’essai ! Rarement effectuée, elle est fortement recommandée. Au minimum, le coiffeur doit poser des questions pour savoir s’il travaille sur un terrain allergique. Cette touche, que nous conseillons d’appliquer derrière l’oreille avec du colorant pur pour une évaluation en 48 heures, n’est que peu réalisée. Les cas de réaction sont d’environ un sur 700 000 applications. C’est peu… mais quand cela vous arrive, c’est impressionnant ! Si la touche est seulement recommandée et non obligatoire, le coiffeur reste responsable à 100% si la cliente réagit mal. »