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La Rédaction de L'Eclaireur www.leclaireur-coiffeurs.com

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L' équipe de la rédaction de L' ECLAIREUR composée de  Brice Thiron, Florence Baumann assisté de l' éditeur Christian GUY ainsi que d' autres contributeurs occasionnels ont  réuni les archives de L'ECLAIREUR,  Vous bénéficiez ainsi de plus de 75 ans d' expérience de la coiffure cumulées par nos équipes,  lesquelles ont interviewé  les plus grands professionnels,  dans tous les métiers.

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19 février 2011

Bonjour?

je suis un perdu et ignorant dans ce domaine des reglementations. Pourriez vous me faire d'horizon des règles générales de prévention..?

Merci d' avance

Luca

Le travail, c’est la santé ? Pas toujours... et surtout pas dans la coiffure ! Problèmes respiratoires, de peau ou articulaires, les coiffeurs paient un lourd tribut au métier. Mais la prévention donne de bons résultats. Ces dernières années, un peu partout en France, des médecins ou étudiants en médecine ont étudié de près le métier. Devant la fréquence des consultations de coiffeurs, une étude spécifique a même été lancée par le Centre de Pathologies Professionnelles de l’Hôpital Intercommunal de Créteil, en région parisienne. C’est dire ! Mais au fait, de quoi souffrent les coiffeurs ? De douleurs dorsales, de problèmes articulaires, veineux, respiratoires, et surtout de maladies de peau. D’ailleurs, la Sécurité Sociale elle-même reconnaît comme «maladie professionnelle» certains eczémas, asthmes, rhinites et problèmes articulaires.


LE PROBLÈME : LA RECONVERSION
Certains s’en rendent compte dès l’apprentissage, et sont alors obligés de changer de voie : un moindre mal, pourrait-on dire.

Parfois, c’est bien plus tard que les troubles apparaissent. Conséquence : cela peut conduire à se séparer de collaborateurs talentueux ou, dans le pire des cas, à mettre soi-même la clé sous la porte. Cas extrême ? Sans doute, mais d’après des données fournies par la Caisse Ava coiffure-esthétique, 3 % des chefs d’entreprise avaient cessé la coiffure pour cause d’allergies respiratoires en 2000... 3 %, ce n’est pas énorme, mais rapporté à près de 60 000 patrons de salon, ça commence quand même à faire du monde. Avec tous les problèmes de reconversion qu’on peut imaginer. Concernant les salariés, la démarche est la suivante : le collaborateur touché fait une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la Sécurité Sociale. Si la reconnaissance est accordée, et que le salarié est jugé par le médecin du travail «inapte» à reprendre ses fonctions, l’employeur doit lui proposer une solution de reclassement, à un poste qui ne l’exposerait pas aux allergènes. Ce qui, on s’en doute, n’est pas vraiment simple dans un salon... Cela dit, l’administration admet assez facilement, pour les petites structures, qu’il n’est pas possible de proposer un reclassement. Dans ce cas, c’est le licenciement.
Du coup, il y a un an, la Fédération Nationale de la Coiffure a lancé une grande campagne de prévention, et publié des fiches en ce sens rédigées en collaboration avec la CRAMIF (Caisse Régionale d’Assurance Maladie Ile-de-France) et d’autres institutions. On y apprend ainsi que rien qu’en Ile-de-France, en 5 ans, près de 500 cas de maladies professionnelles ont été reconnus dans la coiffure. Parmi eux, 78 % concernent des maladies d’origine allergique (61 % d’eczémas, sur le dos des mains, voire entre les doigts et sur les avant-bras, 17 % de problèmes respiratoires, asthmes ou rhinites) ; les 22 % restants sont des affections péri-articulaires liées à la répétition de gestes, les fameux TMS (troubles musculo-squelettiques). Mais ce n’est pas tout. En-dehors des cas vraiment identifiés comme pathologies professionnelles, on déplore tout un éventail de troubles plus ou moins gênants : crevasses sur les mains ou sécheresse de la peau dûes à des dermatoses d’irritation, picotements des yeux, du nez et de la gorge, douleurs, problèmes veineux... En fait, les troubles vont de la simple gêne à l’abandon pur et simple du métier.

PAS UNE FATALITÉ
Au banc des accusés : d’abord certains éléments présents dans les produits.

C’est vrai, ils ont beaucoup évolué, et la recherche ne ménage pas ses efforts en ce sens ! Mais une partie des composants, incontournables, ne fait pas toujours bon ménage avec la peau ou les poumons des coiffeurs. En vrac : les formaldéhydes (présents dans les shampooings), les persulfates alcalins (produits de décoloration), les colorants... qui peuvent entraîner des problèmes de peau et/ou respiratoires. L’eau également, dont le contact prolongé détruit le film qui protège la peau. On peut citer aussi le nickel des instruments de coupe, parfois responsables d’allergies. Et, concernant les TMS et les douleurs, ce sont bien sûr les gestes répétitifs du poignet et du coude, parfois effectués dans une mauvaise posture, et le maniement du séchoir qui sont en cause. Enfin, le travail debout en chaleur humide favorise les troubles veineux.
Une fatalité ? Pas complètement. Bien sûr, ce n’est pas demain qu’on permanentera ou éclaircira les cheveux à l’eau pure... Mais la prévention, ça marche aussi. Ce qui est d’autant plus intéressant qu’il est toujours dommage de voir des collaborateurs doués renoncer au métier, ou pire d'être soi-même touché. Et que les maladies professionnelles, tout comme les accidents du travail, finissent par coûter cher à toutes les entreprises au niveau cotisations. Sans compter que lorsqu’un salarié développe une pathologie professionnelle, le salon n’est pas à l’abri de la visite d’un médecin du travail qui inspectera les lieux.

GANTS ET VENTILATION
Ainsi, l’idéal pour éviter les allergies respiratoires est de prévoir à la fois une ventilation générale et localisée.
Ce que l’on appelle «ventilation générale» désigne le renouvellement de l’air ambiant. Il est facilité par les systèmes de climatisation ou réversibles «chaud/froid» ; sinon, il est important d’aérer suffisamment pour renouveler l’air régulièrement... exigence qui fait d’ailleurs partie du Code du Travail ! La ventilation «localisée», c’est en fait une extraction à la source des polluants, donc dans le labo. Il existe tout un tas de systèmes, plus ou moins onéreux : mais seuls 10% des salons en sont équipés. Le plus simple étant le bras aspirant réglable, qui crée une dépression à l’intérieur du local et aspire donc les poussières produites. Enfin, question ménage, le sèche-cheveux est à proscrire... il ne fait que disperser les poussières et les petits cheveux dans le salon ! L’idéal : le nettoyage «humide» (à l’éponge) et les aspirateurs munis de filtres spécifiques (type filtres HEPA), qui ne rejettent pas les poussières les plus fines dans l’air, au contraire des aspirateurs à filtre «standard».
Quant aux problèmes de peau, la première des préventions consiste bien sûr à porter des gants, pas en permanence bien sûr, mais dès que les mains sont au contact de substances qui risquent d’être allergisantes : préparation du mélange colorant, application et rinçage des produits de permanente, de coloration et d’éclaircissement, et même nettoyage du matériel. L’idéal serait d’en porter aussi pour les shampooings. Les choses se compliquent pour les allergiques au latex, qui opteront alors pour des gants en nitrile.
Sinon, on n’oublie pas d’enduire ses mains d’une bonne crème, véritable barrière contre les agressions. Et ce, même dehors par les temps d’hiver. Quand on se lave les mains, on enlève les bijoux pour un vrai nettoyage en profondeur et un bon séchage... Et en prime, on décide, une bonne fois pour toutes, d’arrêter de se laver les mains avec le shampooing «pour aller plus vite» ! Enfin, les outils aux manches recouverts de plastique évitent à la peau d’entrer en contact avec le nickel.
Pour les TMS et douleurs, la prévention est plus délicate : jusqu’à preuve du contraire, un coiffeur passe beaucoup de temps à couper les cheveux et manier le séchoir... Le tabouret réglable et pivotant peut apporter un certain soulagement, tout comme les bacs de lavage à bonne hauteur. Et prévenir vaut tellement mieux que guérir...

STRESS, QUAND TU NOUS TIENS...
Conséquence moins évidente du métier : le stress engendré par la relation commerciale (d’autant que tout ce qui touche à l’image est très sensible chez les gens), et aussi par le rôle de «confident» parfois joué par le coiffeur. Un médecin du travail cite le cas d’une coiffeuse qui dans la même matinée, avait dû subir le récit détaillé de deux divorces et trois cancers ! Un peu éprouvant...
Mais ce stress n’est que l’aspect négatif d’une réalité : la coiffure est aussi un métier relationnel et de contact. Cela ne changera jamais... et finalement tant mieux !

DES MALADIES  RECONNUES
Certaines affections peuvent être prises en charge par la Sécurité Sociale au titre des maladies professionnelles :
- l’asthme, lorsqu’il est dû aux persulfates alcalins des produits, aux amines aromatiques ou aux matières colorantes.
- l’eczéma (ou plutôt les «lésions eczématiformes») entraîné par les persulfates alcalins (produits d’éclaircissement), les ammoniums quaternaires (colorations), les acrylates (laques), l’aldéhyde formique (shampooings).
- les TMS provoqués par certains gestes ou postures de travail.

SANDRA, 23 ANS 

«Cap sur la coupe»
Sandra, 23 ans, travaille dans un des salons Georges Tayar, à Boulogne-Billancourt. «Après un apprentissage et un début d’activité sans problème, j’ai vu apparaître un eczéma de contact. En fait, je suis allergique aux poudres décolorantes et aux pigments foncés, et ça continuait malgré le port de gants.» Sandra est alors affectée un temps à la réception : «c’était dur, car j’aime mon métier». Elle se lance dans la manucurie, suit un stage de pose de faux ongles, et l’activité est lancée dans le salon où elle travaille. Les odeurs, trop fortes, indisposent la clientèle : arrêt de l’activité. «Mon patron m’a alors formée à la coupe, et je suis coiffeuse depuis un an, toujours chez Georges Tayar. Bien sûr, j’ai une pointe de regret car la technique, c’était vraiment mon truc. Cela dit, j’aime ce que je fais, et je suis restée dans le milieu de la coiffure, c’est le principal.» Ne souffrant pas d’allergies respiratoires, Sandra peut continuer à travailler en salon, en faisant évoluer ses compétences.


CAROLINE MONNET, 40 ANS («SECRETS DE COIFFEUR» À BOURG-EN-BRESSE)
«Tout à coup, vous n’êtes plus rien»

Salariée à 17 ans, installée à 24, Caroline Monnet commence à souffrir de rhinites 3 ans après la création de son affaire. De plus en plus fréquentes, de plus en plus intenses... «Mais on ne s’écoute pas quand on est chef d’entreprise.» Il y a 2 ans, son état s’aggrave brutalement, elle connaît 5 crises d’asthme en 5 semaines et se retrouve à l’hopital. Le verdict des médecins tombe : arrêt définitif de la profession... à 38 ans. Là démarre un véritable parcours du combattant, entre ANPE et organismes de formation. «Stages, bilans de compétences, j’ai tout fait. Je me retrouvais avec des cas lourds, souvent des chômeurs en fin de droits. Ancienne chef d’entreprise, j’étais mal vue : pour les gens que je côtoyais en formation, les «patrons» sont tous «riches et emmerdants»...Caroline fait un stage dans une banque : pour rester, il faudrait être mobile géographiquement. Pas facile avec deux enfants en bas âge. Elle travaille dans un restaurant. Conséquence : une crise d’asthme liée à un désinfectant. Là, elle réalise que non seulement la coiffure, mais nombre d’autres métiers lui sont interdits, en raison des produits. Ou du manque de diplômes. «Nous, coiffeurs, avons arrêté l’école tôt : quand il faut changer de métier, beaucoup de portes nous sont fermées... A 40 ans, on se demande : mais qu’est-ce que je sais faire d’autre ? Et vous n’êtes plus rien, ni artisan, ni salariée... rien.» Voici 2 mois, Caroline a ouvert à Bourg-en-Bresse une boutique où elle vend des perruques et des colorations à faire à la maison. Face aux critiques de certains coiffeurs, elle rétorque : «Certaines femmes ne m’ont pas attendue pour se fournir dans les supermarchés, c’est elles que je cible, pas celles qui vont en salon. Et je demande à mes anciens confrères : que feriez-vous si vous deviez vous reconvertir à 40 ans ?»