NOS EXPERTS

La Rédaction de L'Eclaireur www.leclaireur-coiffeurs.com

La Rédaction de L'Eclaireur www.leclaireur-coiffeurs.com

L' équipe de la rédaction de L' ECLAIREUR composée de  Brice Thiron, Florence Baumann assisté de l' éditeur Christian GUY ainsi que d' autres contributeurs occasionnels ont  réuni les archives de L'ECLAIREUR,  Vous bénéficiez ainsi de plus de 75 ans d' expérience de la coiffure cumulées par nos équipes,  lesquelles ont interviewé  les plus grands professionnels,  dans tous les métiers.

POSER VOS QUESTIONS POSER VOS QUESTIONS POSER VOS QUESTIONS
15 décembre 2010

Je me pose sérieusement la question, y a t il un potentiel dans la coloration homme ?

Merci pour votre réponse.


Pour un homme, la coloration, au même titre que le remplacement capillaire, est un non-sujet de conversation. Il semble n’exister aucune demande pour cette prestation, sauf lorsque le coiffeur la propose et prouve sa maîtrise, et ce en toute discrétion ! A première vue, les services de coloration masculine paraissent inexistants. Du coup, personne n’a l’air de s’étonner du fait que nombre d’hommes publics, surtout des artistes et des politiciens, arborent moins de 20 % de cheveux blancs, même lorsqu’ils tutoient les 70 ans ! Pour emporter l’adhésion de la clientèle masculine, les prestations couleur doivent privilégier une logique d’invisibilité. C’est ce que les grands laboratoire ont parfaitement compris, après des années de tâtonnements : pour séduire l’homme, le service coloration doit être rapide et discret. Autres impératifs: une bonne tenue de la teinte (pour ne plus y penser) et des jeux de transparences (pour avoir l’air de ne pas y toucher) ; en outre, la couleur doit s’atténuer de façon harmonieuse, sans effet de barre aux racines ni reflets disgracieux. Rien à dire : les hommes sont au moins aussi exigeants que les femmes, voire un peu plus.

1 - L’HOMME EST PRESSÉ
« Auparavant, ce n’était pas évident de tout concilier : une application de la coloration à la fois rapide et correcte (sans avoir la main trop légère ou, au contraire, trop lourde, ce qui plombe la couleur) », constate Nicolas Christ, coiffeur ambassadeur L’Oréal Professionnel basé à Strasbourg (Bas-Rhin). « Mais avec Cover 5’ nous avons le produit idéal pour séduire une clientèle masculine, se réjouit-il. Et il accroche vraiment, notamment auprès d’hommes d’affaires désireux de paraître plus jeunes, mais sans avoir l’air d’être colorés. » Le naturel et la subtilité sont au cœur de la demande masculine. « Peu de place pour la fantaisie, même parmi les plus jeunes ! insiste Philippe Brun, directeur technique chez Revlon Professional/American Crew. On a bien vu des microcourants, comme le gris il y a une dizaine d’années, mais cette nuance n’a pas tenu longtemps : trop compliquée à réaliser et difficile à entretenir (ce qui déplaît aux hommes). Pour les satisfaire, on ne sort pas des teintes classiques (châtain clair ou cendré, blond cendré), et l’on évite d’ajouter de la brillance. » La notion de temps de pose est cruciale comme en témoigne la nouvelle coloration Precision Blend d’American Crew : là encore en 5 minutes, c’est réglé ! « Il est hors de question d’espérer garder un homme 30 à 40 minutes pour lui faire une couleur, s’amuse Philippe Brun. Si l’on veut faire accepter ce service à un maximum de clients, il est capital d’appliquer rapidement un produit de préférence sans odeur, et hop ! ni vu ni connu. » Chez Rodolphe, c’est un peu différent, car les hommes qui poussent la porte de « Coloré par Rodolphe » attendent un peu plus. « Pour ces messieurs, confie-t-il, la discrétion est de mise : on les installe à l’écart ou dans une cabine, ils ont l’air de venir pour rafraîchir leur coupe. Et beaucoup préfèrent que le coloriste soit un homme, pour ne pas se montrer à leur désavantage devant une femme… »

2 - L’HOMME EST PUDIQUE
L’un des points les plus importants en coloration masculine n’a rien à voir avec la technique, mais relève de la psychologie. Le terme « coloration » ne doit pas être prononcé devant les messieurs : il les fait fuir ! A vous de trouver, dans la grande famille des euphémismes, une formule qui vous conviendra. « Une couverture rapide en transparence. Une repigmentation en transparence, sans effets de racines… » propose par exemple Nicolas Christ. Et d’expliquer : « Pour l’homme, la coloration, c’est tabou ! De même, lors de la coupe, on évite de parler de ”dégradé”, cela renvoie à un imaginaire négatif. » Pour sa part, Rodolphe évoque « un soin pour atténuer les cheveux blancs », plutôt qu’une « coloration ». Même délicatesse du côté de Philippe Brun, qui parle de services « de patine, de couverture douce des cheveux blancs ; ou alors, on propose juste de ”les estomper” ». La subtilité est aussi dans l’approche : « nous parlons avec le client pour tester ses réactions, savoir comment il vit l’apparition des cheveux blancs » insiste-t-il. En revanche, une fois que le service a été adopté, la récompense est au rendez-vous : la fidélisation est quasiment sans faille. En effet, l’homme part souvent du principe que moins il y a de personnes qui le voient se faire colorer les cheveux, mieux il se porte. Qu’une seule soit au courant (son coiffeur), et c’est déjà presque trop. Une crainte qui peut faire sourire, mais que l’on doit garder en tête. Il convient donc d’imposer la patte du coiffeur avant que les hommes ne finissent par adopter les bons kits grand public qui commencent à garnir les rayons des supermarchés. « Un véritable service de coloration pour hommes nous permet d’élargir grandement notre clientèle et de faire croître nos revenus, estime Philippe Brun. Nous n’irons pas jusqu’à doubler notre chiffre d’affaires, mais son augmentation peut se révéler substantielle. » Même analyse de la part de Nicolas Christ : « Il n’y a pas de demande exprimée pour ce marché, c’est ce qui rend l’étude de son potentiel difficile. Mais on se rend compte que la proposition au bac ou lors des différentes phases de discussion, notamment durant la coupe, aboutit très souvent. Parfois, l’idée met un peu de temps à mûrir dans la tête de l’homme, mais la base des clients qui passent à la coloration est en croissance constante. » Et la fiche moyenne, enfin, décolle
un peu…

3 - L’HOMME ATTEND AUTRE CHOSE
Pourquoi des colorations spécifiques pour hommes sont-elles nécessaires ? Parce qu’à moins de créer soi-même ses mélanges, les couleurs appliquées aux femmes ne conviennent pas toujours. « Les cheveux masculins sont souvent plus chargés en teintes chaudes, ce qui peut entraîner de faux reflets disgracieux lorsqu’ils s’oxydent. Cette réaction met à nu trop de pigments chauds, lesquels apportent une dominance rouge ou orange artificielle. Une coloration masculine doit être enrichie en pigments froids (bleus) pour rester naturelle », explique Philippe Brun. De même, la structure du cheveu de l’homme n’est pas exactement similaire à celle du cheveu de la femme. « Le cheveu masculin est plus chargé en fer, précise Rodolphe, il réagit plus intensément à une oxydation trop importante. Il vaut mieux privilégier les tons sur tons, et ajouter des pigments froids.» L’homme étant souvent incapable d’attendre plus de 10 minutes, le temps de pose réduit est vraiment le point fort des nouvelles colorations qui lui sont destinées. « Pour un meilleur effet visuel, conseille Nicolas Christ, il faut adapter les teintes qu’on applique au pourcentage de cheveux blancs ; avec toujours en ligne de mire le rendu naturel. Ainsi, sur un châtain foncé comportant 10 % à 20 % de cheveux blancs, on posera un châtain clair, ce qui permet de donner plus de transparence sans foncer la base naturelle. La couleur s’atténuera par la suite avec plus de douceur. » Pour un résultat imperceptible, on choisira, selon le pourcentage de cheveux blancs, une coloration d’1 à 3 tons plus claire que la teinte naturelle de la chevelure. Plus le pourcentage de cheveux blancs est élevé, plus le risque d’un rendu artificiel augmente. D’ailleurs, cet argument de la coloration tout en transparence est en train convaincre aussi les femmes, ne serait-ce que pour son côté moins contraignant et le vieillissement mieux maîtrisé.

4 - L’HOMME EST FIDÈLE…
« Autre souci pour les hommes : ils sont peu portés sur l’entretien de la coloration d’où, au retour de vacances, des teintes de cheveux qui, là encore, virent au roux ou jaunissent. Sans oublier l’effet ”repousse”, d’un rendu catastrophique, ajoute encore Philippe Brun. C’est pour cela que les techniques de coloration en transparence et semi-permanente, qui permettent une atténuation harmonieuse de la couleur, sont à privilégier. On ne couvre presque jamais tous les cheveux blancs, contrairement à ce qui se pratique chez les femmes. Les services masculins ne s’improvisent pas, en coupe comme en couleur, ou dans les approches spécifiques de type barbier. Du coup, on remarque un certain retour des salons spécialisés, un temps vus comme désuets.» L’homme a perdu l’habitude qu’on s’occupe de lui et doit être reconquis. Et Nicolas Christ de souligner : « Ils sont peu familiarisés avec la coloration, mais lorsqu’ils essaient les nouvelles techniques, ils les gardent ! » Chez Rodolphe, les hommes, dont la présence était marginale à l’ouverture du salon, représentent aujourd’hui 25 %  de la clientèle. Et le coloriste d’expliquer : « Ils sont socialement de plus en plus soumis à une pression liée au culte de la jeunesse : pour eux aussi, l’apparence est devenue plus importante. C’est particulièrement vrai au travail, où les cadres d’une cinquantaine d’années doivent paraître jeunes et dynamiques. Ils ne peuvent se permettre de rater leur coloration en la réalisant eux-mêmes (avec le risque d’obtenir un effet ”casque noir” ou une teinte qui vire au roux), et ils ont donc besoin de nous. »

 


UN MARCHÉ EMBRYONNAIRE

La coloration masculine, pour l’instant embryonnaire, pourrait devenir un fort vecteur de croissance..

En France, si les femmes ont depuis longtemps adopté la coloration de façon massive (plus des 3/4 d’entre elles), pour la couverture des cheveux blancs mais pas seulement, les hommes ne sont qu’environ 3 % à avoir franchi ce cap. Pourtant, en 2009, tandis que le marché de la coloration féminine était en repli, celui de la coloration masculine connaissait une légère croissance. Chez nous, le créneau reste marginal, pour des raisons culturelles, alors que ce geste est -presque- devenu banal dans d’autres pays, comme les Etats-Unis. Mais il y a tout de même de l’espoir : en 20 ans en France, le pourcentage d’hommes adeptes de cosmétiques (autres que les produits de rasage et déodorants !) est passé de moins de 5 % à plus de 25 %  (pour seulement 10 % en volume d’affaires). Alors, pourquoi pas pour la coloration !

 L'Eclaireur